
Arrêtez de vous rassurer en achetant du matériel. Une pharmacie de bord, même la plus complète, est un poids mort sans la compétence pour l’utiliser. Ce guide démontre que le véritable kit de secours n’est pas la boîte, mais l’équipage lui-même. Il vous montrera comment passer d’un simple détenteur de matériel à un premier intervenant compétent, capable de faire la différence entre un incident et un drame en mer.
En tant que chef de bord, vous avez probablement coché toutes les cases. La pharmacie de bord, conforme à la Division 240, est là, bien rangée, remplie de pansements, d’antiseptiques et de médicaments. C’est un totem rassurant. Mais soyons honnêtes un instant : si un équipier fait un malaise violent, se blesse gravement ou présente une réaction allergique fulgurante, savez-vous précisément quoi faire ? Au-delà de tendre une boîte de compresses, votre matériel ne vous sera d’aucune aide. La plupart des navigateurs se concentrent sur le « quoi » — le contenu de la trousse — en oubliant totalement le « comment » et le « pourquoi ».
L’erreur fondamentale est de considérer la sécurité comme un achat. On achète une pharmacie, un gilet, une balise, et on se sent en sécurité. C’est une illusion dangereuse. Le matériel est passif ; il attend. La compétence, elle, est active ; elle analyse, décide et agit. La véritable sécurité en mer ne repose pas sur votre inventaire, mais sur la capacité de votre équipage à gérer une situation d’urgence. Le meilleur investissement pour la sécurité de vos proches n’est pas dans un pansement de plus, mais dans les heures de formation qui transformeront chaque équipier en un maillon fiable de la chaîne de survie.
Cet article n’est pas une énième liste de matériel. Il est un plaidoyer pour un changement de paradigme. Nous allons déconstruire le mythe de la « bonne pharmacie » pour vous prouver que la compétence prime sur tout. Nous aborderons la gestion des traitements personnels, les gestes vitaux adaptés au milieu marin, les spécificités pour les enfants, et surtout, comment et quand déclencher les secours efficacement. L’objectif est simple : faire de vous et de votre équipage votre propre premier secours.
Cet article est structuré pour vous guider pas à pas, de la simple organisation à la gestion de crise. Découvrez comment transformer votre approche de la sécurité à bord grâce à notre sommaire détaillé.
Sommaire : Rendre votre pharmacie de bord enfin opérationnelle
- Comment gérer les médicaments personnels de vos équipiers en croisière
- Les 3 gestes de premiers secours qui peuvent sauver une vie à bord
- La pharmacie de bord spéciale « moussaillons » : ce qu’elle doit contenir
- Comment reconnaître un signal d’alerte vital et déclencher les secours à temps
- Quelle formation aux premiers secours choisir quand on est navigateur ?
- Homme à la mer : la procédure que chaque équipier doit connaître par cœur
- Comment gérer les petites blessures à bord quand on est loin d’un médecin
- Le jour où tout bascule : comment votre préparation fera la différence entre l’incident et l’accident
Comment gérer les médicaments personnels de vos équipiers en croisière
Le premier angle mort de la sécurité à bord n’est pas dans votre pharmacie, mais dans les poches de vos équipiers. Chacun embarque avec ses propres traitements, allergies et pathologies. Gérer cet aspect n’est pas une option, c’est une responsabilité. L’improvisation n’a pas sa place. Un protocole clair doit être établi avant même de larguer les amarres. La première étape est de mettre en place une fiche santé confidentielle pour chaque personne à bord. Ce document doit inclure les traitements en cours, les allergies connues, le groupe sanguin et la personne à contacter en cas d’urgence.
Ces fiches, une fois remplies, doivent être conservées ensemble dans une pochette étanche et scellée, avec la mention « Urgence médicale uniquement ». Le skipper est le gardien de cette pochette. De même, les médicaments personnels doivent être centralisés dans une boîte dédiée, si possible verrouillée et stockée à l’abri de la chaleur et de l’humidité. La règle d’or est simple : personne ne doit accéder à ces médicaments sans une procédure claire, idéalement après avoir pris l’avis du Centre de Consultation Médicale Maritime (CCMM). C’est ce centre que vous contacterez en premier lieu pour un avis médical qualifié, avant même d’envisager d’ouvrir la boîte.
Cette organisation peut sembler contraignante, mais elle est vitale. Elle prévient l’automédication hasardeuse et garantit qu’en cas d’intervention du CCMM ou d’une évacuation, les secours disposeront d’informations fiables et centralisées. Savoir que, selon les données 2024 du CCMM de Toulouse, 5% des consultations aboutissent à une évacuation médicalisée, souligne l’importance capitale d’une information médicale précise et rapidement accessible. Former votre équipage à cette procédure et à la manière de contacter le CROSS (via VHF canal 16) pour joindre le CCMM est votre première compétence active.
Les 3 gestes de premiers secours qui peuvent sauver une vie à bord
Face à une urgence vitale, le temps est votre pire ennemi. Loin de tout secours, seuls quelques gestes simples, mais maîtrisés, peuvent maintenir une victime en vie. Inutile de connaître 50 techniques : trois compétences fondamentales couvrent la majorité des situations critiques à bord. La première est la capacité à évaluer l’état de conscience et la respiration. Une victime qui ne répond pas et ne respire pas (ou respire anormalement) est en arrêt cardiaque. Votre seule action efficace est de débuter immédiatement un massage cardiaque (compressions thoraciques) et d’alerter les secours.
Le deuxième geste clé est la gestion d’une hémorragie externe. Face à un saignement abondant, la priorité absolue est de comprimer manuellement la plaie avec la paume de la main, en utilisant un tissu propre. Maintenez cette pression sans interruption jusqu’à la mise en place d’un pansement compressif. Oubliez les images de garrots improvisés qui font plus de dégâts qu’autre chose s’ils sont mal maîtrisés. La compression directe est le geste qui sauve.
Enfin, le troisième geste est la mise en Position Latérale de Sécurité (PLS). Si la victime est inconsciente mais respire normalement, cette position empêche sa langue d’obstruer ses voies aériennes et évite l’étouffement en cas de vomissements. Cependant, la théorie apprise en salle doit être adaptée à la réalité d’un bateau. L’exiguïté, la gîte et le roulis complexifient le geste.
Étude de cas : Adaptation de la PLS en milieu marin
La mise en Position Latérale de Sécurité sur un bateau nécessite une intelligence situationnelle. Le protocole du CCMM, basé sur des retours d’expérience, préconise des adaptations spécifiques : dans un cockpit étroit, il faut utiliser les banquettes comme appui pour stabiliser la victime. En cas de gîte marquée, la tête doit toujours être positionnée vers le haut de la pente pour faciliter la respiration. Le plus important est de sécuriser la victime avec des coussins, des sacs de voile ou des gilets pour qu’elle ne roule pas avec les mouvements du bateau, tout en maintenant un contact visuel et en communiquant sa position exacte lors de l’appel VHF, comme le préconise une analyse des pratiques de premiers secours en mer.
Ces trois compétences forment le socle de votre capacité d’action. Les maîtriser, c’est détenir les clés pour stabiliser une victime en attendant les secours.
La pharmacie de bord spéciale « moussaillons » : ce qu’elle doit contenir
La majorité des plaisanciers ne prévoit pas suffisamment de médicaments et de matériels à bord de leur bateau pour pouvoir soigner une blessure ou une douleur, même bénigne.
– Dr Roux, Médecin responsable du CCMM
Cette affirmation est encore plus vraie lorsqu’un enfant est à bord. Un enfant n’est pas un adulte en miniature. Son organisme réagit différemment, les dosages des médicaments sont critiques et les petits accidents (chutes, piqûres, fièvre) sont plus fréquents. Votre pharmacie de bord standard est probablement inadaptée, voire dangereuse pour un jeune équipier. La première règle est d’embarquer des médicaments sous forme pédiatrique : solutés de réhydratation orale en cas de vomissements ou diarrhée, paracétamol en sachet ou suppositoire, crème apaisante pour les piqûres d’insectes et une crème solaire à très haute protection.
La plus grande source d’erreur est le dosage. Donner un médicament pour adulte à un enfant, même à dose réduite « à vue de nez », est une pratique à proscrire absolument. Le poids de l’enfant est le seul critère fiable. Avant de partir, préparez une fiche plastifiée avec les dosages de paracétamol correspondant au poids de chaque enfant à bord. Cela vous évitera de faire des calculs hasardeux en pleine nuit, alors que le bateau bouge et que votre enfant a 39°C de fièvre. C’est un exemple parfait de préparation qui transforme une situation stressante en une procédure maîtrisée.
Le tableau suivant, basé sur les recommandations générales, est un guide essentiel. Il doit cependant toujours être validé par votre médecin ou pharmacien avant le départ, qui pourra l’adapter à l’état de santé spécifique de votre enfant.
| Poids de l’enfant | Paracétamol (Doliprane) | Fréquence max | Mode administration en mer |
|---|---|---|---|
| 10-15 kg (1-3 ans) | 150-200 mg | 4 fois/jour | Sachet dilué dans peu d’eau, pipette stabilisée |
| 15-20 kg (3-6 ans) | 200-300 mg | 4 fois/jour | Sachet ou suppositoire si vomissements |
| 20-30 kg (6-10 ans) | 300-450 mg | 4 fois/jour | Comprimé orodispersible privilégié |
Enfin, n’oubliez pas le matériel spécifique : des pansements colorés et ludiques pour dédramatiser les petits bobos, une pince à échardes fine, des dosettes de sérum physiologique pour nettoyer les yeux ou le nez, et un thermomètre électronique fiable.
Comment reconnaître un signal d’alerte vital et déclencher les secours à temps
En mer, l’isolement transforme un problème médical en une crise potentielle. La compétence la plus critique n’est pas toujours de soigner, mais de reconnaître le moment où il faut passer la main. Attendre trop longtemps avant d’appeler les secours est une erreur fréquente et potentiellement fatale. Vous devez savoir identifier les signaux d’alerte vitaux qui imposent un appel d’urgence immédiat. Parmi eux : une douleur thoracique intense et persistante qui irradie dans le bras ou la mâchoire, une difficulté soudaine à respirer, une perte de connaissance même brève, une paralysie ou une difficulté à parler, ou encore une hémorragie que vous ne parvenez pas à contrôler.
Face à l’un de ces signaux, n’hésitez pas. Ne vous dites pas « ça va peut-être passer ». Votre rôle s’arrête là où commence celui des professionnels. Déclenchez immédiatement les secours. En France, cela signifie contacter le CROSS (Centre Régional Opérationnel de Surveillance et de Sauvetage) via le canal 16 de la VHF. C’est le moyen le plus fiable et le plus efficace, car il permet aux secours de vous localiser et à tous les navires sur zone d’entendre votre appel. Le téléphone portable n’est qu’une solution de secours, limitée par la couverture réseau.
Un appel d’urgence ne s’improvise pas sous le coup du stress. Il doit être structuré pour être efficace. La méthode BILAN est un script mnémotechnique à connaître par cœur. Il garantit que vous transmettrez toutes les informations essentielles de manière claire et concise. Entraînez-vous à le dérouler à blanc avec votre équipage. Le jour où vous en aurez besoin, cette préparation fera toute la différence, permettant aux 15 000 sauvetages en mer coordonnés par les CROSS chaque année de se dérouler dans les meilleures conditions.
Votre script d’appel d’urgence VHF (méthode BILAN)
- B – Bilan circonstanciel : « Mayday Mayday Mayday, ici [nom du bateau], urgence médicale à bord ». Répétez trois fois.
- I – Identification : « Voilier [nom], pavillon français, numéro MMSI [votre numéro] ».
- L – Localisation : « Position GPS [latitude/longitude] ou à [distance] dans le [relèvement] de [point connu] ».
- A – Avitaillement : « [nombre] de personnes à bord, autonomie de [heures] en carburant ».
- N – Nature du problème : « Victime de [âge], de sexe [masculin/féminin], consciente/inconsciente, présente les symptômes suivants : [décrire précisément]. Les gestes suivants ont été effectués : [préciser] ».
Quelle formation aux premiers secours choisir quand on est navigateur ?
Vous l’avez compris : la compétence est reine. Mais face à la multitude de formations existantes, laquelle choisir ? Toutes ne se valent pas pour un usage en mer. Votre choix doit être guidé par la pertinence et la spécificité du contenu par rapport à l’environnement marin. La formation de base, que tout citoyen devrait posséder, est le PSC1 (Prévention et Secours Civiques de niveau 1). En 7 à 8 heures, elle vous apprendra les gestes essentiels face aux situations les plus courantes : malaise, plaies, brûlures, arrêt cardiaque. C’est le socle indispensable, mais il reste généraliste.
Pour un navigateur, l’idéal est de viser une formation qui prend en compte les contraintes de la mer : l’isolement, le matériel limité, les conditions de communication et l’environnement mouvant. La formation PS-Mer (Premiers Secours en Mer), souvent proposée par la FFVoile ou des organismes agréés, est spécifiquement conçue pour cela. D’une durée de 16 heures, elle reprend les bases du PSC1 mais les applique à des scénarios maritimes : hypothermie, gestion d’un équipier blessé dans la gîte, utilisation du matériel de la pharmacie de bord, etc. C’est sans conteste le meilleur rapport durée/pertinence pour la plaisance côtière et semi-hauturière.
Pour ceux qui préparent un long voyage ou une transatlantique, la Formation Médicale Hauturière (parfois appelée « Médical 3 ») est le niveau ultime. Sur plusieurs jours, elle est dispensée par des médecins urgentistes et vous forme à des gestes plus techniques (sutures, gestion de pathologies lourdes) et à l’utilisation de la dotation médicale complète, en lien constant avec le CCMM. C’est un investissement significatif, mais absolument justifié quand l’hôpital le plus proche est à plusieurs jours de mer.
Le tableau comparatif suivant vous aidera à y voir plus clair, basé sur les offres de formations reconnues en France comme celles proposées par la SNSM.

| Formation | Durée | Coût moyen | Pertinence navigation | Validité |
|---|---|---|---|---|
| PSC1 | 7-8h | 55-65€ | Base essentielle | Illimitée (recyclage conseillé) |
| PSE1 | 35h | 250-350€ | Approfondi mais généraliste | 1 an |
| PS-Mer FFVoile | 16h | 200-300€ | Spécifique milieu marin | 3 ans |
| Formation Médicale Hauturière | 3 jours | 450-600€ | Idéal voyage au long cours | 3 ans |
Homme à la mer : la procédure que chaque équipier doit connaître par cœur
Le succès de la récupération d’un homme à la mer dépend de la bonne exécution d’un ensemble d’actions coordonnées entre tous les marins.
– Institut Maritime de Prévention, Guide de sécurité en mer
L’homme à la mer (MOB – Man Over Board) est le scénario catastrophe pour tout équipage. Dans cette situation, la panique est l’ennemi numéro un et la technologie ne vous sauvera pas. Seule une procédure répétée, connue de tous et exécutée sans hésitation peut faire la différence. Le premier réflexe doit être une action immédiate et coordonnée : la personne qui voit la chute crie « HOMME À LA MER ! » le plus fort possible, en précisant le côté (bâbord/tribord). Ce cri est le signal qui déclenche une répartition des rôles pré-définie.
Cette organisation, qui doit être briefée avant chaque départ en mer avec des équipiers non aguerris, est la clé du succès. Elle évite que tout le monde se précipite pour faire la même chose ou, pire, que personne ne fasse rien. L’expérience de la SNSM montre qu’une répartition claire des rôles est fondamentale. Le Témoin ne fait qu’une seule chose : il ne quitte jamais la victime des yeux et la pointe du doigt en permanence. Le Barreur entame immédiatement la manœuvre de récupération convenue (Quick Stop, Boutakoff, etc.). Le Communicant se prépare à lancer un appel MAYDAY sur le canal 16. Et le Récupérateur prépare tout le matériel : bouée, ligne de jet, et échelle de bain.
La manœuvre de récupération elle-même doit être entraînée. La plus simple et souvent la plus efficace pour un équipage réduit est la « Quick Stop » : le barreur vire de bord immédiatement sans toucher aux écoutes, laissant le foc à contre. Le bateau s’arrête ainsi naturellement à quelques mètres de la victime. Quelle que soit la méthode choisie, elle doit être adaptée à votre bateau et maîtrisée. L’objectif n’est pas la vitesse, mais la précision et la sécurité. Il est plus important de revenir stabilisé et en contrôle près de la victime que d’arriver vite et de la percuter. C’est une compétence d’équipe, où chaque geste compte et où l’entraînement prime sur l’improvisation.
Comment gérer les petites blessures à bord quand on est loin d’un médecin
On se focalise souvent sur les drames, mais la majorité des interventions médicales en mer concernent des blessures considérées comme « bénignes » : coupures, brûlures, contusions. Loin d’un médecin, une petite blessure mal gérée peut cependant vite s’infecter et dégénérer. Votre compétence réside ici dans votre capacité à évaluer la gravité et à appliquer un protocole de soin rigoureux. Une simple coupure avec un couteau à huîtres n’est pas anodine : est-elle profonde ? Touche-t-elle une articulation ? Le saignement est-il contrôlable ?
Pour éviter de prendre la mauvaise décision, un arbre de décision simple est un outil précieux. Il vous aide à déterminer si vous pouvez gérer la situation seul, si vous devez demander un avis au CCMM, ou s’il s’agit d’une urgence absolue nécessitant un déclenchement des secours. Pour une coupure, par exemple, si elle est superficielle, mesure moins de 2 cm et que le saignement est maîtrisé après compression, vous pouvez la gérer à bord. Si elle est plus profonde, ou si vous avez un doute, l’appel au CCMM s’impose. Ce service, qui, selon le bilan d’activité du Centre de Consultation Médicale Maritime, assure plus de 3000 téléconsultations par an, est votre médecin de référence en mer, disponible 24h/24.
Quel que soit le soin, le protocole d’asepsie est non-négociable. L’environnement marin est humide et propice au développement des bactéries. Avant de toucher une plaie, le lavage des mains à l’eau douce et au savon est impératif. La plaie elle-même doit être nettoyée abondamment à l’eau douce (ou au sérum physiologique) pour enlever toute souillure, puis désinfectée avec un antiseptique comme la chlorhexidine. C’est seulement après ces étapes que vous pourrez poser un pansement ou des bandelettes de suture adhésives (Stéri-Strip). Omettre l’une de ces étapes par précipitation est le meilleur moyen de transformer une simple coupure en une infection sérieuse.
Votre arbre de décision pour une coupure en mer
- Niveau 1 – Gérer seul : La coupure mesure moins de 2 cm, elle est superficielle, le saignement est contrôlé rapidement et elle n’est pas sur une articulation.
- Niveau 2 – Consulter le CCMM : La coupure mesure entre 2 et 5 cm, elle semble profonde mais sans atteinte visible des tendons, ou vous avez le moindre doute.
- Niveau 3 – Urgence absolue (MAYDAY) : La coupure fait plus de 5 cm, le saignement est pulsatile (en jet), vous voyez des tendons ou un os, ou elle est localisée au visage ou au cou.
- Protocole de soin (pour Niveau 1) : Lavez-vous les mains. Lavez la plaie. Désinfectez avec de la chlorhexidine. Comprimez 5 minutes. Fermez avec des Stéri-Strips si les bords sont nets et la plaie inférieure à 3 cm, sinon couvrez avec un pansement compressif.
À retenir
- La compétence prime toujours sur le matériel. Une pharmacie n’est qu’un outil ; l’équipage est l’acteur de la sécurité.
- Votre capacité à agir repose sur un trinôme simple : Évaluer la situation, Agir avec les gestes justes, et Communiquer efficacement avec les secours.
- La formation spécialisée (PS-Mer) n’est pas un coût, mais l’investissement le plus rentable pour la sécurité de vos proches en mer.
Le jour où tout bascule : comment votre préparation fera la différence entre l’incident et l’accident
En mer, il y a les incidents et il y a les accidents. La différence entre les deux ne tient souvent qu’à un fil : la préparation. Un incident est un événement imprévu que vous gérez avec compétence. Un accident est un incident que vous n’avez pas su gérer. Toute votre démarche de formation, d’organisation et d’entraînement vise à maintenir chaque événement dans la catégorie « incident ». C’est un état d’esprit. Il s’agit de remplacer la peur de l’inconnu par la confiance dans vos protocoles. Cette confiance ne vient pas de la certitude que rien n’arrivera, mais de la certitude que vous saurez quoi faire si quelque chose arrive.
Le témoignage de ceux qui ont vécu une situation critique en mer est unanime. Comme le raconte Vincent Delire, médecin anesthésiste et navigateur expérimenté :
Si quelqu’un fait un infarctus au milieu de l’Atlantique, ça peut être 3 à 4 jours d’attente avant l’arrivée des secours. La différence entre la vie et la mort tient à la préparation de l’équipage. J’ai vu des situations où la formation PSC1 combinée à une bonne communication avec le CCMM a permis de stabiliser des victimes pendant 48h en attendant l’évacuation. La clé : ne pas paniquer, suivre le protocole, communiquer clairement.
– Vincent Delire, médecin et navigateur
Cette préparation n’est pas seulement technique, elle est aussi matérielle et organisationnelle. Le « cahier de sécurité » du bateau en est la pierre angulaire. Ce n’est pas un simple document administratif, mais votre base de données de crise. Il centralise toutes les informations vitales et les procédures d’urgence, accessibles en un instant, même dans le chaos.
Votre plan d’action pour un cahier de sécurité efficace
- Centraliser les informations humaines : Créez une section dédiée aux fiches santé confidentielles de chaque équipier (allergies, traitements, contacts d’urgence).
- Gérer l’inventaire matériel : Tenez à jour un inventaire de votre pharmacie avec les dates de péremption sur un tableau de suivi mensuel pour ne rien laisser au hasard.
- Formaliser les procédures : Imprimez et plastifiez les protocoles d’urgence essentiels : homme à la mer (MOB), script d’appel MAYDAY, et fiche mémo du massage cardiaque.
- Tracer les entraînements : Tenez un journal des exercices de sécurité effectués (MOB, utilisation VHF), avec la date, les participants et les points d’amélioration constatés.
- Consolider les contacts vitaux : Ayez une page dédiée avec les coordonnées des CROSS de votre zone de navigation, le numéro du CCMM, et les fréquences VHF importantes.
En fin de compte, votre pharmacie de bord n’est que le dernier maillon d’une longue chaîne de compétences. Sans la connaissance, l’organisation et l’entraînement, elle n’est qu’une boîte de promesses vides. La véritable sécurité est un processus actif, un investissement immatériel dans votre savoir-faire et celui de votre équipage.
N’attendez pas l’incident pour regretter votre manque de préparation. Le pas le plus important à franchir n’est pas d’acheter un nouveau gadget de sécurité, mais de vous inscrire, vous et votre équipage, à une formation de premiers secours adaptée au milieu marin. C’est le seul investissement qui peut réellement sauver une vie.